Démodé, religieux, ringard : autant d’adjectifs pour qualifier l’orgue, cet instrument méconnu. Le festival Toulouse les Orgues a largement de quoi vous le faire (re)découvrir et apprécier. Explications.
La curiosité n’attend pas le début du concert pour poindre. Photo : Paul Roquecave
Aparté s’est glissé à la soirée Élixirs Sonores, la préouverture du festival Toulouse les Orgues. Organisée dans le cadre de la Semaine de l’Étudiant elle a pour but de faire découvrir l’instrument à un jeune public. Pari plutôt réussi compte tenu des quelques trois cent sièges occupés dans l’église Notre-Dame de la Dalbade (pour une capacité d’accueil de quatre cent places).
Pourquoi se laisser séduire ?
Charmante singularité
Comme toute entrée dans une église, celle des auditeurs se fait dans le calme. Curieux, intrigués ou encore intimidés, les spectateurs investissent les bancs de Notre-Dame de la Dalbade. Ils s’assoient dos à l’orgue, situé dans l’entrée de l’église, situation qui s’avérera parfois comique, et qui participe à l’étrangeté ainsi qu’au charme de l’expérience. Une question nous chiffonne : faut-il applaudir entre chaque morceau ?
Des effets de lumière ont ponctué le concert et attiré l’oeil à l’opposé de l’orgue. Photo : Paul Roquecave.
Maintenue formelle par la force du lieu, l’ambiance se meut en un bouillonnement de curiosité alors que l’on annonce le premier artiste : Virgile Monin, organiste établi à Toulouse.
Extrait du concert de Virgile Monin
Lorsqu’il entame les premières notes, non sans provoquer quelques frissons, il fait se retourner une bonne partie de l’auditoire. Outre la majesté de l’instrument, ce qui frappe c’est l’impossibilité de discerner l’artiste qui l’utilise. Une part de mystère, qu’on accepte volontiers avant de se remettre dos à l’orgue et de se laisser happer par la musique.
Les frissons d’une fin de morceau (Virgile Monin)
L’intensité des notes, fortifiée par la caisse de résonance qu’offre le lieu, prend aux tripes. La voie enchanteresse d’Anna Von Hausswolff viendra parfaire cette sensation en deuxième partie de soirée. Sa performance est rythmée par très peu de paroles. Presque incantatoires celles-ci suffisent à donner le ton d’une représentation très particulière.
La sublime voix d’Anna von Hausswolff résonne dans une église toute ouïe
Paroles d’organistes
Les artistes inaugurant le festival ont accepté de se livrer au jeu des questions/réponses. Rien de mieux que leur propres mots pour décrire les spécificités de l’orgue.
Virgile Monin nous confie qu’il a découvert l’orgue en regardant la Famille Addams, à l’âge de 5 ou 6 ans. Photo : Paul Roquecave.
Pour parfaire le cadre de cette intrigante soirée nous avons investi des lieux curieux pour les interviews : la sacristie, où l’ambiance solennelle et feutrée est propice aux confidences de Virgile Monin sur sa passion ; puis le balcon de l’orgue, où Anna Von Hausswolff vient tout juste de terminer sa représentation.
Pourquoi avoir choisi l’orgue ? L’interview de Virgile Monin
Déformation professionnelle ou nervosité ? Virgile Monin pianote sur la table pendant une bonne partie de l’interview. Aussi curieux que cela puisse paraître, il écoute très peu de musique. Lui qui en fait toute la journée n’a « pas le temps d’approfondir« .
« Il y a tant d’histoire dans cet endroit, c’est bouleversant ! Cela accentue l’émotion et m’aide à rentrer dans une ambiance particulière », confie Anna von Hausswolff
L’artiste a réalisé un album ici-même, dans l’église Notre-Dame de la Dalbade. Il explique qu’il est « très agréable de jouer là où l’on habite« . Il a particulièrement apprécié ce concert-découverte, pour lequel la démarche de proposition de morceaux est plus « intéressante » que devant des initiés.
Tellement enchantée par la singularité de l’orgue toulousain, Anna Von Hausswolff a adapté sa prestation. Photo : Paul Roquecave.
L’approche d’Anna est encore différente, puisqu’elle allie sa voix à l’orgue. Elle qui écrit et compose une musique non religieuse, est ravie de cette « approche plus contemporaine qui permet de rendre cette musique accessible aux personnes en dehors de l’Église » .
Comme expliqué par Virgile Monin, chaque orgue a sa particularité, ce qui n’a pas manqué de toucher la chanteuse suédoise. « Quand je suis arrivée, j’avais une idée de ce que j’allais jouer. La manière dont l’orgue sonne était tellement fantastique et différente de ce que je connais que j’ai décidé de réarranger mes morceaux, et même d’en jouer d’autres que ceux prévus« , confie Anna.
Contrairement à Virgile Monin, Anna von Hauswolff est une grande consommatrice de musique. Sa chanson préférée est la cover de Bobby Darin du morceau If I were a carpenter, de Tim Hardin.
Vous pouvez retrouver le reste de la programmation de Toulouse Les Orgues jusqu’au 16 octobre 2016.