À Toulouse, près d’un millier de personnes ont défilé pour la 3e fois « contre les violences policières » dans un certain chaos ce samedi 22 novembre. La manifestation, qui n’avait pas été déposée en préfecture, s’est heurtée à un important dispositif policier. Repoussé de l’hyper-centre par les camions anti-émeutes, le cortège s’est écoulé sur la rive gauche jusque Patte-d’Oie. Sous les lacrymogènes, le trajet a été émaillé de quelques clashs entre les manifestants et la police. Les forces de l’ordre ont été dépassées par les événements.

17h01. Les gaz lacrymogènes se dissipent lentement autour du rond point de Patte d’Oie, sur la rive gauche. Quelques minutes plus tôt, les policiers de la brigade anti-criminalité (BAC) tiraient plusieurs grenades afin de disperser, disent-ils, les éléments les plus échaudés. Les pacifistes, qui respirent le même gaz, protestent. Retour sur les événements.
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15h22. À Esquirol, des centaines de sympathisants de la cause de Sivens se sont rassemblés via les réseaux sociaux. Devant les camions anti-émeute et le canon à eau, des manifestants charrient les CRS dans une ambiance bon enfant.
15h34. Comme c’est devenu la coutume lors de ces rassemblements, des sympathisants grimés en clowns venus de la « zone à défendre » (Zad) et de la faculté du Mirail amusent la foule et les forces de l’ordre. Ils arborent le nez rouge devenu le symbole de la lutte du Testet. « Face à la peur qu’ils essaient d’instaurer, on répond par le rire. Le rire, c’est une thérapie », confie Pabette, l’une d’eux. « On se réapproprie nos rues, comme on se réapproprie la forêt de Sivens. »
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15h40. Sont également regroupés dans le cortège des étudiants des facultés du Mirail, de l’Arsenal, de Paul Sabatier et de Sciences Po Toulouse qui, dernièrement, ont fait grand bruit en raison de leurs revendications anti-flic et contre les privatisations à l’université. « Qui sème la misère, récolte la colère« , scandent-ils. Derrière eux, les Black Blocks, pas venus les mains dans les poches, enfilent leur attirail : masques à gaz, lunettes, cagoules.
15h59. « Vous interdisez au public de pouvoir circuler, cette manifestation n’est pas autorisée. » Après cette annonce crachotée par un policier au mégaphone, la foule quitte le centre-ville et progresse vers le Pont-Neuf, sous la surveillance de la BAC.
16h02. Les ruelles alentours sont bloquées par les forces de l’ordre. Un hélicoptère survole le cortège, qui gonfle de volume et traverse la Garonne. Certains s’affolent, imaginant que les CRS vont les serrer sur le pont. « Avec un dispositif pareil, ils font ce qu’ils veulent de nous. Malgré ça, ils nous font vagabonder », entend-on.
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16h20. Les manifestants se dirigent vers le secteur Saint-Cyprien. Au loin, des camionnettes de police franchissent le pont Saint-Pierre les gyrophares enclenchés.
16h33. À Saint-Cyprien, certaines personnes en tête de la manifestation se positionnent face aux forces de l’ordre. « Dégagez, dégagez », vocifèrent-ils, escagassés d’avoir été privés de leur droit à manifester. L’un d’entre eux, qui s’était illustré un peu plus tôt par un jet de bouteille en verre, va au clash. Sévère retour de bâton. Il parvient à s’extirper des mains des CRS.
16h34. L’instant d’après, la BAC réplique par plusieurs tirs de grenades lacrymogènes en plein milieu du reste de la foule, restée à l’arrière. Manifestants et journalistes s’enfuient à toutes jambes.
16h50. « Ne marchez pas sur les fleurs. » Au rond point de Saint-Cyprien, les forces de l’ordre essuient quelques jets de projectiles venus d’éléments isolés. Les auteurs sont majoritairement hués par la foule. Certains tentent de négocier le passage avec les CRS, complètement débordés par le nombre de manifestants.
À ce stade, quatre personnes ont été interpellées.
17h09. Les manifestants sont parvenus à écarter les CRS pour progresser vers Patte d’Oie. Talonné par la BAC, le cortège est aspergé de gaz lacrymogène. Dans la confusion, la manifestation se disloque.
17h18. Des heurts ont lieu entre la BAC et quelques éléments cagoulés. Pour les policiers, la situation est ingérable. Ils improvisent chaotiquement. Leur « plan B », qui consistait à évacuer les manifestants hors du centre-ville, est en lambeaux. Patte d’Oie est recouverte de gaz.
17h24. Quelques personnes ont incendié des poubelles sous les protestations des autres, restés eux pacifiques et sans rien dégrader. Ils tentent de les éteindre pour éviter que le feu ne se répande aux voitures.
17h25. Des protestataires s’écharpent. « Laissez cramer, ça soulève le lacrymogène. » À droite à gauche, on s’échange du sérum pour les yeux pour apaiser les effets des gaz asphyxiants.
17h26. La BAC est arrivée sur place en catapultant des grenades assourdissantes. Plusieurs tags émaillent les murs : « On tient la rue ». Quelques vitres de panneaux publicitaires et de distributeurs de bilets ont été mises en pièces. Au loin, des Black Blocks.
17h28. Une barricade improvisée sur l’avenue de Grande-Bretagne a été incendiée, aspergée d’essence. Ci et là, les manifestants se dispersent dans les ruelles. Le cortège se dilue par grappes dans le quartier. Quelques personnes isolées, cagoulées, entrent dans un jeu de chat et de la souris avec les forces de l’ordre.
17h51. Le canon à eau, destiné originellement aux manifestants, est actionné pour éteindre les feux. « Il faut déblayer la barricade », lance un officier.
17h54. Chose faite, après avoir canardé d’eau principalement des photographes et des journalistes, les derniers sur place, dans l’incompréhension générale.
17h58. « Vous ne savez pas où est passée la manif’ ? »
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La traque des manifestants a duré jusque 19h30, étendue jusqu’à l’avenue du Muret. Dans un communiqué livré à 19h45, la préfecture a défendu un « usage modéré » des lacrymogènes. Seize personnes ont été interpellées pour « port d’armes » et « violences à l’encontre des forces de l’ordre » — le fait d’une « minorité violente ». Selon France3, un journaliste de Radio Canada aurait été blessé dans les bousculades. Deux blessés sont à compter parmi les forces de l’ordre. Le nombre de manifestants blessés, lui, n’est pas mentionné.