Quelques centaines de personnes ont manifesté dans une atmosphère très tendue samedi 8 novembre à Toulouse, après l’interdiction par arrêté préfectoral de la manifestation, déclarée « hors délai » par le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA). Placé sous le signe de la lutte contre « les violences policières », le cortège a été drastiquement quadrillé par un dispositif de sécurité spectaculaire, des dizaines de camion antiémeutes et plus de trois cent gendarmes et policiers. À l’issue des clashs et des gazages qui ont duré jusque dans la soirée, 21 personnes ont été interpellées.

16h46 — Une manifestante remonte, cagoulée, les Allées Jean Jaurès recouvertes de gaz lacrymogènes. Ci et là, des grenades éclatent. Le sol est jonché de goupilles, de douilles et de cavadres d’engins explosifs. Il est 16h46, et l’ambiance à Toulouse est complètement chaotique. Retour sur les événements qui ont écorché cette journée du 8 novembre.
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14h27 — Début du rassemblement à Jean Jaurès. Les manifestants rendent hommage à la mémoire de Rémi Fraisse par une minute de silence. Le militant écologiste est tombé à Sivens dans la nuit du 25 au 26 octobre.
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14h50 — Des zadistes grimés en clowns tentent de décrocher un sourire aux gendarmes en train de tisser un cordon de sécurité entre la bouche du métro Jean Jaurès et la Place Wilson, pour écarter les manifestants du centre-ville. Beaucoup de bleu sur la place.
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15h01 — À l’appel du NPA, le cortège part en direction de la médiathèque, sous l’étroite surveillance des CRS. Une présence policière massive « dans la droite lignée de la criminalisation des mouvements sociaux », regrette Robin, membre du comité Jeune du NPA.
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15h22 — Près de Matabiau. Une ligne de policiers, renforcée par des camions antiémeutes, se dresse à quelques centaines de mètres devant la médiathèque peu avant l’arrivée de la manifestation. Sirènes et fusils à flashballs sont de sortie. Les clowns n’en démordent pas et tentent d’amuser la galerie.

15h38 — Équipés de masques à gaz, les CRS renforcent leurs positions. Des manifestants montrent pacifiquement leur opposition, en soufflant des bulles de savon dans leur direction.
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15h49 — « Cette manifestation est interdite. Nous allons faire usage de la force » signifie un officier au mégaphone. Ses déclarations sont accompagnées par les protestations et les huées de la foule, restée non-violente.

15h51 — Après les sommations d’usage, premiers tirs de grenades lacrymogènes…

15h52 — … qui retombent au beau milieu de la foule. Les manifestants se précipitent pour quitter l’avenue principale et se réfugier sur les trottoirs. Ils se bouchent les voies respiratoires pour atténuer les effets des lacrymogènes.
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16h00 — D’autres tirs de grenades tombent sur les manifestants. Ils tentent de les repousser du pied.


16h03 — Des embryons de résistance se forment par endroits. Certains zadistes s’organisent en sit-in et d’autres tiennent leur position, toujours non-violents. Très agressifs, des CRS gazent et frappent tous azimuts. Les journalistes ne sont pas épargnés, parfois directement visés.
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16h06 — Plusieurs assauts policiers se succèdent. Des nuages de fumée grisâtres s’échappent des Allées Jean Jaurès, qui de plus en plus prennent l’allure d’une zone de guerre. L’allée est bouchée de chaque côté.
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16h07 — Du côté du métro Jean Jaurès, où la foule se dirige pour échapper aux effets des gaz asphyxiants, CRS et gendarmes lancent des grenades lacrymogènes et assourdissantes. L’étau policier a pris forme. Coincées entre deux feux, des personnes cagoulées en marge de la manifestation tentent de dresser une simili-barricade.
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16h08 — Des protestataires jettent des objets enflammés sur les brigades anti-criminalité (BAC), qui font la tortue derrière leurs boucliers, et se déplacent en crabe. Les ruelles alentours sont également bouchées par des cordons policiers.
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16h11 — Les tensions sont montées d’un cran. Dotés de masques à gaz et de lunettes de protection, un groupe de personnes visiblement composés de « Black blocs » (ces manifestants radicaux, vêtus de noir, masqués et généralement violents) ripostent à la violence policière en expédiant des projectiles et des cocktails molotov sur la BAC. Certains scandent « un flic, une balle ».
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16h16 — Les CRS ont barricadé l’accès à Jean Jaurès. C’est une véritable souricière. Devant les boucliers et camions antiémeutes, des dizaines de manifestants suffoquent sans porte de sortie, gazés par des lacrymogènes à bout portant. « Ils balancent ça comme de l’insecticide sur des cafards » s’indigne Anaïs*, étudiante à Sciences Po Toulouse, écoeurée. Les manifestants s’échangent des sérums pour les yeux, et arrosent leurs foulards avec du jus de citron pour mieux résister aux gaz.
* le prénom a été modifié.

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16h23 — Une voiture a pris feu, victime des affrontements CRS-Black Blocs. Les pompiers interviennent illico.
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16h25 — Une banderole aspergée de liquide inflammable brûle durant quelques minutes. Les barrières policières sont toujours en place.
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16h32 — « Un bon flic est un flic mort. » Un individu masqué taggue sa haine des forces de l’ordre.
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16h51 — Nouvel assaut des forces de l’ordre. La BAC interpelle virulemment des manifestants. Les agents distribuent des coups de pied et abattent leurs matraques sur plusieurs individus, pourtant immobilisés au sol.
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16h53 — La BAC emmène un individu interpellé.
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16h57 — Malgré les coups et les gaz, les zadistes clownesques continuent d’amuser la foule.
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17h01 — Nombre de manifestants restent pacifistes mordicus.
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18h03 — Après avoir mené plusieurs assauts près de Matabiau, gazé la Place Belfort, et menacé plusieurs journalistes, la BAC se retrouve coincée dans un jeu de chat et de la souris avec des petits groupes de manifestants éparpillés. Elle entre dans un clash avec des individus extérieurs à la manifestation, qui les tire vers Arnaud Bernard. Ces mêmes agents nous bousculent à coups de « dégage ! » et nous empêchent de prendre des photos de leurs interpellations musclées.
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18h17 — La présence policière attire de nombreux curieux. « Ils sont super provoquants, il faudrait qu’il se calment » entend-on.
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18h19 — Une section de la BAC s’engouffre à Arnaud Bernard, où ils interpellent brutalement plusieurs personnes. Pendant ce temps, des zadistes font un dernier sit-in pacifique Place du Capitole. Bilan de la journée, 21 interpellations. 17 sont toujours en garde à vue.
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